Tout le monde connaît le panda géant ou l’hirondelle, nous possédons de nombreuses connaissances sur leurs lieux de vie, leurs habitudes. En revanche, personne ou presque n’a entendu parler de l’ombonie épineuse (en photo ci-dessus) ou encore de l'Augocoris gomesii.
C’est cela le biais taxonomique : le fait que certaines espèces (animales ou végétales) soient particulièrement bien connues des scientifiques (et du grand public), que nous disposions de nombreuses données sur leurs aires de répartition, leurs modes de vie, leurs comportements alors que d’autres organismes nous sont totalement inconnus.
Pourquoi ce biais taxonomique existe-t-il ?
Les causes de ce biais peuvent être multiples :
- Certaines espèces sont proches de nous, comme l’hirondelle qui fait son nid à proximité de nos habitations. Il est donc naturel que nous en sachions plus sur elle que sur une punaise vivant au cœur de la forêt amazonienne.
- D’autres sont des espèces patrimoniales ou emblématiques comme le panda et font de l'ombre à d'autres espèces par l'attachement qu'elles provoquent auprès du grand public.
- Certaines espèces sont particulièrement discrètes ou ont un cycle de vie très court, ce qui rend très difficile leur observation.
Qui n'aurait pas envie d'étudier le panda géant ?
Mais il existe également un effet dit « sociétal » qui pourrait en partie expliquer l’existence de ce biais. En effet, une étude (Troudet et al., 2017) a récemment montré que les données étaient plus nombreuses pour les organismes particulièrement appréciés des populations. Ainsi, un plus grand nombre de recherche est mené sur des espèces ou des groupes d’espèces ayant une bonne image auprès du grand public et des scientifiques, au détriment d’espèces moins « glamour » mais tout aussi utiles pour les écosystèmes.
Par exemple, la moitié des données que l’on peut trouver sur le Global Biodiversity Information Facility concerne les oiseaux alors que ce groupe ne compte que 13 000 espèces. Au contraire, les insectes qui représentent 70% du règne animal (350 000 espèces) ne représentent que 15% des données.
Quelles peuvent être les conséquences ?
Connaître une espèce et ses exigences écologiques est un prérequis essentiel afin de les protéger. Notre méconnaissance de certains organismes peut donc nous inciter à faire des mauvais choix en termes de programme de protection ou de politique d’aménagement des territoires.
En nous désintéressant de certaines espèces, nous passons également à coté de certaines de leurs qualités insoupçonnées. Par exemple, pendant de nombreuses années, nous avons négligé d’étudier les couleuvres (qui représentent pourtant environ 2000 espèces) car ne possédant pas de crochets venimeux, ces animaux étaient inoffensifs pour l’Homme. Ce n’est que très récemment, que nous avons commencé à prendre conscience de leurs potentiels pour la médecine. En effet, les molécules présentes dans ces venins pourraient permettre de créer une nouvelle gamme d’anticoagulant, d’analgésique et pourquoi pas de produit anti-cancéreux.
Comment corriger ce biais ?
Une fois le biais et ses causes identifiés, on peut les corriger.
Tout d’abord, en approfondissant les recherches sur les groupes d’espèces sous-étudiées telles que les insectes ou les reptiles. C’est le rôle des scientifiques mais également des citoyens !
En rejoignant un programme de sciences participatives tel que SPIPOLL, Un Dragon ! Dans mon Jardin ? ou encore Insectes et Ciel Etoilé, vous pouvez contribuer à une meilleure connaissance (et reconnaissance) de ces oubliés de la biodiversité.